rallumons-les-étoiles
Alors que la nuit noire se fait rare, les activistes entendent diriger le regard des passants vers les étoiles. C’est munis de perches et de blanc de Meudon que ceux-ci cherchent à rendre son obscurité à la nuit, en neutralisant temporairement les sources lumineuses artificielles superflues.

Pour ce qui devait être initialement le jour de la nuit, les membres du collectif local Résistance à l’Agression Publicitaire (RAP), ont été rejoints par les membres des groupes locaux de Youth For Climate, Greenpeace, ANV-COP21 et Extinction Rebellion. L’action, consistant en l’extinction d’enseignes de magasin et le recouvrement de panneaux de publicité lumineux, a pour objectif de sensibiliser aux effets néfastes de la « publicité lumineuse ». Elle a été menée dans le respect des mesures sanitaires en vigueur, toutes les précautions ayant été prises pour ne pas nuire à la santé des uns et des autres.

En plus de nous priver de l’observation du ciel étoilé, la pollution lumineuse a de nombreuses conséquences qui peinent à intéresser l’opinion publique et politique. Les répercussions de la luminosité induite par l’activité humaine, de plus en plus intense, sont en effet peu perceptibles à notre échelle, mais sont loin d’être négligeables. Les effets néfastes sur notre santé, tels que l’augmentation de la fatigue, du stress et de la surcharge cognitive, commencent à être documentés par les recherches en sciences cognitives. Il est également attesté que, en plus de représenter un important gaspillage énergétique – avec une consommation estimée à 68000 kW/an par panneau muni d’une seule face numérique- cette forme de pollution nuit directement à l’environnement. 

L’éclairage nocturne est une source de nuisance importante pour la faune, affectant les habitats naturels et la répartition des espèces sur le territoire notamment pour les espèces nocturnes, qui représentent 28 % des vertébrés et 64 % des invertébrés, dont la survie repose sur l’obscurité. Parmi les victimes de la pollution lumineuse les plus connues, on trouve les papillons de nuit, les vers luisants, les grenouilles et crapauds, et les oiseaux migrateurs. Les espèces encore citadines il y a un siècle voient progressivement leurs habitats s’éloigner des zones urbaines, fragilisant tout l’écosystème. La flore n’est pas en reste : si la lumière joue un rôle prépondérant dans le cycle vital des végétaux, la réduction, le déplacement voire la disparition des espèces pollinisatrices elles-mêmes impactées par l’éclairage aggravent fortement leur péril.

La pollution lumineuse est donc un facteur participant au déclin de la biodiversité, qui s’accentue de manière drastique, alors que les sources de lumière artificielle se multiplient à grande vitesse. En plus de l’éclairage public et privé déjà envahissant, il faut compter l’éclairage de la publicité qui s’étend maintenant sur des écrans numériques.

Certes, des lois de transition énergétique pour la croissance verte et la biodiversité tendent à réglementer l’éclairage. L’arrêté du 27 décembre 2018 impose par exemple l’extinction de l’éclairage des vitrines des magasins de commerce ou d’exposition au plus tard à 1 heure du matin ou une heure après la cessation d’activité, et l’allumage à 7h du matin au plus tôt ou une heure avant le début de l’activité. Quant à la « publicité lumineuse », entendue comme « publicité à la réalisation de laquelle participe une source lumineuse spécialement prévue à cet effet », le Code de l’environnement en stipule les normes en vigueur, telles que son interdiction dans les communes de moins de 10000 habitants. Alors que les enseignes et les publicités installées sur le domaine privé ont une obligation d’extinction entre 1h et 7h du matin dans la plupart des cas, aucune obligation ne touche actuellement les publicités installées sur le domaine public (voir le détail de la réglementation actuelle). En outre, les seuils de réglementation encadrant les normes techniques de production de lumière artificielle sont le plus souvent élevés. Il n’est pas rare de constater des écarts au respect de la réglementation, et dans les faits, les sanctions sont peu appliquées.

D’où l’importance de telles manifestations pour faire avancer la discussion collective et la prise de décision politique. Les activistes espèrent attirer l’attention de toutes les parties prenantes : habitants, commerçants, mais aussi élus qui travaillent à la définition du règlement local de publicité intercommunal (RLPI) du PLUI (Plan Local d’Urbanisme Intercommunal), sur les bénéfices qu’engendrerait la diminution de la pollution lumineuse. 

Ainsi, RAP Nancy demande : 

  • L‘interdiction des écrans numériques (enseignes, vitrines et publicité) et des dispositifs d’éclairages d’affiches publicitaires dans l’espace public ;
  • A minima, l’extinction:
    • des publicités lumineuses sur mobilier urbain (abris-bus, « sucettes », kiosques à journaux…) au même titre que les publicités “classiques” sur le domaine privé;
    • des enseignes lumineuses et vitrines dès la fermeture de l’établissement, ainsi qu’en journée entre 9h et 17h.

L’opération a également pour but d’inciter les citoyen-ne-s à participer à la consultation publique qui s’ouvrira prochainement.

Si en 2019, le jour de la nuit avait comptabilisé plus de 700 événements , il est difficile de mesurer aujourd’hui l’engagement des citoyen-ne-s sur cette question, la situation sanitaire actuelle impactant l’action collective. A Nancy, l’appel « Rallumons les étoiles, éteignons les publicités » a été largement suivi.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici